2016-2019| LANGAU - Fondre pour le roi : étude archéométallurgique de l'atelier de bronziers du palais royal d'Angkor Thom

La découverte récente par l’archéologie d’une fonderie royale à Angkor, au Cambodge, a ouvert une nouvelle page du passé artisanal de l’ancien royaume khmer. En cours de déchiffrement, celle-ci laisse progressivement entrevoir non seulement les gestes techniques, mais aussi l’organisation du travail des fondeurs, forgerons et autres artisans qui étaient, il y a près de dix siècles, au service du roi et du palais. Ce site de production métallurgique est ainsi d’un intérêt exceptionnel pour l’étude de l’artisanat du métal pré-moderne, d’autant plus qu’il ne connaît jusqu’ici aucun autre équivalent, que ce soit au Cambodge ou en Asie du Sud-Est.

Le site de la fonderie royale s’inscrit au sein de l’espace urbain dit d’Angkor Thom, ancienne ville-capitale de Yaśodharapura (IXe-XVe siècle). Plus précisément, l’atelier de bronziers est localisé dans le quadrant nord-ouest de la ville, immédiatement au nord de l’enceinte du palais royal.

L’étude archéométallurgique initiée depuis 2016 sur ce site se fait dans le cadre d’un projet de recherche nommé LANGAU, ou « cuivre » en vieux khmer, qui est le résultat d’une collaboration nouvelle entre l’Autorité nationale APSARA et l’École française d’Extrême-Orient. Placé sous la direction de Brice Vincent, il réunit une équipe internationale et largement pluridisciplinaire, avec des archéologues, des archéométallurgistes, des géoarchéologues, des géologues, des physiciens, ou encore des restaurateurs métal. L’une des spécificités méthodologiques du projet LANGAU, bien inséré au sein d’un réseau de laboratoires français et étrangers, est en effet de recourir à une large gamme de moyens analytiques, afin de répondre le mieux possible aux particularités offertes tant par le site étudié que par le très riche mobilier, notamment métallurgique, qui lui est associé.

Inscrit dans la continuité de travaux initiés dès 2012-2013, le projet LANGAU entend poursuivre l’étude du site de la fonderie royale d’Angkor Thom en se fixant deux objectifs complémentaires. D’un côté, il recourt à l’étude technologique pour reconstituer les chaînes opératoires du travail du cuivre et de ses alliages, en particulier pour la fonte à la cire perdue, même si d’autres techniques de mise en œuvre sont également attestées. Pour chaque technique, une restitution la plus fidèle possible est proposée, depuis l’acquisition des matières premières jusqu’à la fabrication de produits finis en alliage à base de cuivre, qu’il s’agisse de petite ou de grande fonderie. L’objectif est d’inventorier et de caractériser l’ensemble des savoir-faire métallurgiques maîtrisés par ces artisans spécialisés que sont les fondeurs royaux. De l’autre, il s’emploie à définir en termes socio-économiques les modalités d’organisation d’un artisanat du métal au service du pouvoir royal. Cela implique de traiter du problème spécifique des termes et des mécanismes de la commande, mais aussi des questions de réseaux d’approvisionnement en matières premières, d’échelle de production, ou encore de réseaux de distribution des produits finis. Pour aborder un tel champ de recherche, quasiment vierge, il convient de replacer ce type de production artisanale au sein de l’économie et de la société angkoriennes, en insistant sur l’interdépendance constante des fondeurs vis-à-vis du roi et du palais.

Projet collaboratif entre l'Autorité nationale APSARA et l'EFEO, avec un premier volet de 3 ans (2016-2019), qui devrait être renouvelé (2019-2022).

Il bénéficie du soutien financier de l'EFEO et, depuis 2017, de la Commission consultative des recherches archéologiques à l'étranger du Ministère de l'Europe et des Affaires étrangères.